04h55 : Je me réveille tout seul. Le réveil était sensé sonner dix minutes plus tard.
Je ne me réveille pas parce que je suis rassasié de sommeil (j'ai eu du mal à me forcer à me coucher tôt cette semaine, j'avais plutôt envie de bouquiner le soir).
Je ne me lève pas non plus par stress ou appréhension.
Non.
Je me lève parce que j'ai vraiment hâte de prendre le départ de la course d'aujourd'hui : les championnats de France de natation en eau libre des Maîtres qui se déroulent à Torcy en Seine et Marne.
Le moins que l'on puisse dire c'est qu'il s'agît d'une course de récréation pour moi.
Je ne l'ai pas préparée (malgré quelques exercices d'eau libre lors des derniers entrainements avec Fabienne, Violaine et Jean-Marc).
Et puis, sur les conseils de Fabienne, je me suis fait dix jours tranquilles après les championnats de France d'été d'Antibes.
Je n'ai donc nagé que deux fois depuis les France en bassin.
J'aborde donc cette course dans l'optique de m'amuser. L'eau libre s'y prête bien avec un aspect ludique qu'on ne peut pas retrouver en bassin.
Je crains toutefois que l'eau soit fraîche. Les dernières semaines n'ont pas été vraiment chaudes et même s'il a (enfin) fait beau la veille, je me demande si cela suffira pour que la température soit au dessus de 18°C.
Nous verrons bien, je ne suis pas frileux de toutes façons.
05h10 : Petit déjeuner avec un reste de gratin de pâtes de la veille.
Il n'y a pas à dire, si ça ne prenait pas plus de temps que de se faire des tartines, je mangerais salé tous les matins...
05h45 : Je suis vraiiiiiment large question timing. Je fais, défais et refais mon sac plusieurs fois : survêtement, appareil photo, combinaison (on ne sait jamais), jammer, lunettes, bonnet, eau, barres de céréales (des fois qu'ils soient pingres comme à Canet en 2010 et qu'il n'y ait pas à manger après la course) : j'ai tout.
06h45 : Je viens de retrouver Philippe, Thierry et Henri au Chesnay où nous nous étions donné rendez-vous pour co-voiturer jusqu'à Torcy. C'est Philippe qui sera notre chauffeur.
07h30 : Nous arrivons à la base de loisir de Torcy.
Aucun soucis sur la route. Je pensais qu'il y aurait plus de monde, s'agissant du premier jour des départs en vacances.
Au secrétariat nous retrouvons Fabienne qui aide au marquage et Lise qui aide au pointage.
Surprise : je découvre que Lise, notre présidente, est enceinte !!
Un petit bébé pour le mois de septembre :)
Nous serons rejoints peu après par Olivier B et George (Hannsgeorge pour être exact, mais il se fait appeler George... ça m'arrange ^^).
Nous sommes donc six gars à représenter la SN Versailles pour ces championnats de France.
Bref, beaucoup plus de testostérone qu'à Antibes où Mathias et moi étions accompagnés de quatre charmantes dames.
C'est pas tout à fait pareil ^^
Les dames du secrétariat nous marquent nos numéros au gros feutre noir sur les omoplates, les épaules et les mains. On nous fournit par ailleurs un bonnet bleu avec notre numéro.
Nous sommes numérotés en fonction de l'ordre alphabétique des clubs, ce qui donne :
- 68 : Henri
- 69 : George
- 70 : Olivier B
- 71 : Philippe
- 72 : Thierry
- 73 : Moi
Il y a un petit flou avant le départ pour trouver le juge arbitre et savoir ce qui est autorisé aux niveaux des combinaisons.
On finit par nous dire que seuls les maillots tamponnés "FINA" (Fédération Internationale de Natation Amateur) ainsi que les combinaisons sans fermeture éclair sont autorisées.
J'ai donc apporté mes deux combinaisons pour rien (une intégrale avec fermeture et un pantalon non floqué FINA). Quelque part, je préfère. Je trouve que nager sans combinaison ça donne plus de valeur à la performance.
Je nagerai donc en jammer.
08h15 : Je me mets en jammer, enfile mon survêtement et je commence mon échauffement à sec.
08h30 : C'est la réunion technique.
On nous explique le parcours.
Il semble assez simple à suivre.
J'avais oublié de prendre en photo le schéma du parcours sur place. Voici donc une reproduction de tête
Nous partons en bas à droite du schéma. En une seule vague (110 nageurs et nageuses). Positionnés derrière une corde.
Quand le juge arbitre baissera le drapeau, nous partirons tous ensemble en direction de la première île que nous laisserons sur notre gauche.
Nous verrons alors la première bouée (notée "1"...) ce qui nous fera longer la deuxième île, toujours en la laissant sur la gauche.
Une fois la bouée passée, virage serré à gauche en direction de la bouée numéro 2.
Puis rebelote, nous tournerons à gauche après la bouée numéro 3.
Ce sera ensuite direction la bouée numéro 4 que nous laisserons sur notre gauche (...) avant de reprendre le chemin de la première boucle.
Ensuite tout est pareil jusqu'au passage de la bouée 3 où là, au lieu de viser la bouée 4 nous viserons le goulot d'étranglement à sa droite qui se termine par l'arrivée, elle-même matérialisée par une plaque qui sera au dessus de notre tête et que nous devrons taper avec la main pour signifier le déclenchement du chrono.
Simple.
Ces deux boucles sont sensées représenter 3km.
On nous annonce par ailleurs qu'en Maîtres les combinaisons avec fermeture éclair sont tolérées.
Ah que fais-je ?
Je me change ?
Bon... allez non, je reste comme ça.
Une fois la réunion technique terminée, je retourne au vestiaire pour me déshabiller et récupérer mes bonnets (celui de la SNV que je mettrai en dessous et celui avec mon numéro que je mettrai par-dessus ; vu sa finesse, je crains en effet de le perdre durant la course) et mes lunettes.
08h45 :
L'appel commence.
Avec les filles d'abord. J'imagine qu'elles seront ravies d'être les premières à l'eau avec largement le temps de se refroidir, d'être sur la première ligne et de se faire nager dessus par tous les gars derrière au départ...
Les garçons ensuite.
La personne qui fait l'appel au micro, ne manque pas de s'arrêter sur le numéro 51 : monsieur Ricard.
Ils n'ont même pas fait exprès.
Tout le monde rigole.
Les versaillais sont appelés dans les derniers.
L'avantage c'est que nous nous mettrons à l'eau à la fin et que nous aurons donc moins le temps de nous refroidir.
L'inconvénient c'est que nous arriverons en dernier donc loin de la ligne de départ. Il faudra peut-être jouer des coudes pour se faire une bonne place.
Fabienne et Violaine (qui nous a rejoint) nous souhaitent bon courage. Fabienne demande aux autres de me suivre et de s'accrocher à mes pieds.
L'eau est annoncée à 21°C.
Effectivement, elle est plutôt bonne.
Le fond du plan d'eau est vaseux. Comme il y a cent nageurs en même temps qui marchent sur le fond et sautillent pour se réchauffer, c'est pas top niveau odeur.
Les joies de l'eau libre.
Je vois un espace un peu dégagé sur la deuxième ligne, sur le côté gauche du départ.
Ca me semble être un bon point de départ, à peu près en face du point à viser pour longer la première île.
J'y vais.
J'y retrouve Denise de Gien avec qui nous avions mangé au restaurant à Antibes.
Nous papotons en sautillant en attendant le départ.
Le juge arbitre nous réexplique le déroulement du départ : il va annoncer "à vos marques", donner un coup de sifflet, baisser son drapeau rouge et la corde devant nous va être levée.
09h00 : Et c'est ainsi que le départ est donné.
- A vos marques
Coup de sifflet
Drapeau rouge.
Je pars vivement. Je force un peu le passage entre les deux gars devant moi.
Je les passe vite, sans jamais avoir reçu un coup.
Je n'en reviens de la douceur du départ.
Je suis d'habitude un peu plus secoué que ça.
Je sais que les 200, 300 voire 500 premiers mètres sont en général assez agités.
Je décide donc de partir fort.
J'aimerais être rapidement tranquille.
Une fois les deux premiers bonhommes passés, je maintiens donc un rythme assez soutenu.
Même pas mal.
Ca passe bien.
Je m'étonne de m'être si bien positionné au départ. D'habitude mes débuts sont un peu chaotiques.
Là je suis quasiment tout de suite dans le groupe de devant.
Enfin... pas tout à fait dans le groupe de devant.
Je vois de la mousse devant moi, je suppose qu'il doit s'agir de David du CNP (ai-je encore besoin de le présenter ?). Je me dis qu'il doit peut-être y avoir des furieux du style de Mathieu de Laon.
Néanmoins, cela semble être un groupe restreint. Je suis loin d'être largué.
J'arrive au niveau de l'île, toujours sur un bon rythme.
Je constate que le rythme cardiaque est bon.
Je me demande si je ne suis pas capable de tenir cette allure pendant toute la course.
CHICHE.
A la moitié de l'île le ménage commence à se faire autour de moi.
Je suis un peu détaché du groupe devant moi (ça avance bien !!). Je n'arrive pas à me rendre compte de combien de personnes sont devant. Ca ne semble pas être un très gros groupe.
Je dois être dans les dix premiers.
J'ai un nageur en combinaison qui est exactement dans mon allure à ma gauche. Je me demande s'il va ralentir ou faire comme moi et tenter de rester sur cette allure.
Nous commençons alors un ballet où ce nageur revient sur moi, j'accélère, reprends de l'avance et où il revient à nouveau sur moi.
Agaçant.
Il est tenace le bougre.
Devant, le groupe est toujours visible. J'ai l'impression que la distance entre eux et moi s'est stabilisée.
Je passe la première île et arrive sur la deuxième.
J'ai un moment de flou pour savoir la direction à suivre.
Je pense d'abord qu'il faut longer la deuxième île avant de pouvoir viser la première bouée.
Je suis à deux doigts de rentrer dans le nageur à ma gauche.
Oups.
Mais...
C'est THIERRY !!!!
Génial !!
Alors donc, je reprends ce que j'ai dit : la situation est loin d'être agaçante, elle est super motivante !
Je réalise pourquoi j'ai failli rentrer dans Thierry : il ne faut pas longer la deuxième île. Dès qu'on passe la première île on peut voir la première bouée. Il faut donc la suivre.
D'ailleurs, il suffit de suivre la mousse du petit groupe devant.
J'essaie donc de tirer tout droit.
A l'évidence, nous n'avons pas la même trajectoire Thierry et moi.
Nous nageons au même niveau mais la distance entre tous les deux s'accroît. Au moins, nous ne nous rentrerons pas dedans.
Je me sens vraiment très bien.
Tous mes mouvements s'enchainent bien. Je peux carrément maintenir cette allure sur trois kilomètres.
Donc, je relance.
Je prends de l'avance sur Thierry et la première bouée approche vite.
Nos trajectoires finissent par converger avec Thierry qui est un peu remonté sur moi.
Décidément, il ne lâche rien !
Je le laisse prendre l'intérieur de la bouée puis je relance après l'avoir passée moi-même. Je me place juste devant lui, mon bassin au niveau de sa tête, pour lui donner ma vague.
Il tient vraiment l'allure. J'espère que nous pourrons rester comme ça un moment.
La distance entre moi et le groupe devant ne semble pas changer. Il doit y avoir autour de cinq personnes.
Bonne surprise, je suis vraiment bien placé.
La deuxième bouée est beaucoup plus facile à viser que la première. Il n'y a que ça dans notre champ de vision.
A nouveau, il semblerait que notre navigation soit différente avec Thierry car nous nous écartons l'un de l'autre.
Vu que Thierry est un grand expert de l'eau libre, je me dis que cela doit être signe que je pars trop à droite. Et pourtant j'ai l'impression de tirer tout droit.
Vraiment, je me sens très très bien.
J'ai l'impression de tirer beaucoup d'eau.
Mon esprit divague un peu.
Je repense à la dernière chanson de Lene Marlin. Je ne sais pas trop pourquoi j'y pense à ce moment précis.
Je me passe la musique dans ma tête.
Je finis par me dire que même si elle est très chouette, son rythme ne sied pas trop à une course. Ce n'est pas aussi énergique que "Uprising" de Muse.
Euuuuuuuh...
Olivier... Tu n'écoutes pas Virgin Radio, tu nages dans les championnats de France d'eau libre !
Oups, oui pardon.
Retour à la réalité.
La bouée approche. De nouveau, nos trajectoires reconvergent avec Thierry.
Notre ballet continue.
Je prends de l'avance. Il me rattrape. Je relance et reprends de l'avance. Il me rattrape...
Je laisse à nouveau l'intérieur de la bouée à Thierry.
Virage à gauche et nouvelle relance.
Le groupe devant semble s'être rapproché.
Oh punaise !
C'est le moment d'attaquer.
Je mule.
Les sensations sont topissimes !
On dirait qu'il y a du courant. Ou plutôt, je sens mes battements très hauts sur l'eau ce qui donne la même sensation que quand on descend le courant.
Coooooooool.
Nouvelle divagation.
Je pense à un de mes profs de Math du collège, M. Ferrari dont nous nous étions aperçus avec Morgane qu'elle avait son frère comme prof de math à son collège.
Mais pourquoi est-ce que je pense à ça maintenant ???
Non mais allo quoi...
Evidemment, pendant cet intermède, Thierry est un peu remonté.
La troisième bouée approche très vite.
Je me demande pour la première fois si nous emmenons un peloton derrière nous.
Je respire deux fois en regardant derrière moi : je ne vois personne.
Etonnant.
Bon, de toute façon, je ne suis pas vraiment en train de gérer ma course, je force pas mal donc je ne pense pas que savoir que quelqu'un est derrière moi va me faire avancer plus vite.
Je ne réitère donc pas l'expérience de respirer derrière moi.
Je laisse un peu moins d'espace à Thierry pour prendre l'intérieur de la bouée.
Désolé, j'ai un peu plus d'avance que sur les deux bouées précédentes, je passe devant.
Le groupe devant est toujours bien visible.
Franchement, je peux le faire.
Je peux les rattraper. Ca serait énorme.
C'est parti mon kiki !
Je dégage plus les épaules.
Je prends plus d'eau.
Respiration à trois temps.
J'ai quelques doutes sur la navigation. Après la troisième bouée on voit à la fois la quatrième bouée et les deux bouées qui marqueront l'entrée du goulot d'étranglement vers l'arrivée. Toutes ces bouées sont blanches. Il ne faut pas que je navigue vers la mauvaise.
La quatrième doit être la bouée la plus à ma gauche.
Je recompte plusieurs fois les bouées jusqu'à être sûr que j'aie bien repéré cette quatrième bouée. C'est bon.
Je peux à nouveau nager plus proprement.
Je prend de l'avance sur Thierry au fur et à mesure jusqu'à ce que je ne le vois plus.
J'espère qu'il arrivera à rester pas loin derrière moi.
Je me sens vraiment très très bien.
Je vire seul à gauche à la quatrième bouée.
Je commence mon deuxième tour et doit à nouveau viser la gauche de la première île.
Repérage facile.
Je garde en tête le conseil de Fabienne de ne pas trop longer les bords de la rive.
Je me mets donc à ce qui doit être trois-quatre mètres du bord.
J'arrive à peu près à la moitié de la première île.
Je longe l'île de plus près qu'au premier tour.
Le rythme est toujours bon.
Néanmoins, j'ai l'impression que le groupe devant a repris de l'avance.
Scrogneugneu.
C'est vrai que les sensations sont moins bonnes.
En même temps que je passe au dessus de ce qui doit être des algues, je réalise que j'ai maintenant l'impression de pédaler dans la choucroute.
Contrairement au passage entre la deuxième et la troisième bouée où j'avais l'impression de descendre le courant, j'ai maintenant l'impression de remonter le courant.
Argh. C'est dur.
Il faut dire que je commence à prendre conscience que j'ai quand même mal aux bras.
Je fais encore quelques centaines de mètres et je ne suis pas loin d'atteindre la deuxième île.
Je vois du mouvement sur ma gauche !
Zut. On me rattrape.
C'est encore Thierry !!
J'ai effectivement dû caler un peu sur le début de cette deuxième boucle.
J'essaie de relancer.
Par ailleurs j'essaie de ne pas faire la même erreur de navigation qu'au premier tour en visant directement la première bouée une fois la première île passée.
Je commence à ressentir des sortes de crampes au niveau des côtes.
Non, plutôt comme des points de côté.
Ouh la la la... c'est pas bon signe.
Je comprends : comme j'ai plus d'aisance à faire la navigation (c'est à dire à regarder devant) quand je suis sensé respirer du côté droit, j'ai fait ce mouvement systématiquement depuis un moment.
J'essaie donc de faire ma navigation quand je suis sensé respirer à droite.
Effectivement, les sensations de points de côté / crampes ne vont pas plus loin et finissent pas s'atténuer.
Notre ballet avec Thierry recommence mais mes relances sont clairement moins marquées.
J'éprouve plus de difficultés à accentuer mon dégagement d'épaules pour prendre plus d'appuis.
Nous passons la première bouée un peu serrés Thierry et moi.
Nous nous donnons même quelques coups pendant la relance.
Je réalise à quel point c'est fabuleux de s'entraîner toute l'année ensemble pour se retrouver à faire quasiment toute l'épreuve d'eau libre des France ensemble.
Le groupe devant a accentué son avance mais je n'assimile pas rapidement l'information.
Je suis plus préoccupé par ma navigation, par ma gestion de la fatigue et par la perspective de faire une dernière grosse relance.
Je prévois de tenter le tout pour le tout après le passage de la deuxième bouée et de faire une belle relance. Ca doit faire encore 800m jusqu'à l'arrivée mais si je ne tente pas de remonter à ce moment là sur les nageurs devant je n'y arriverai jamais.
A mi-chemin entre la première et la deuxième bouée je fais une première "pré-relance".
Ouuuuuuuuh mes aïeux...
Ca va faire mal la fin.
C'est déjà dur maintenant de faire une relançounette, qu'est-ce que ça va être après la bouée...
J'ai en effet toujours du mal à dégager mes épaules et à rester efficace mais, en plus, je sens que le rythme cardiaque commence à s'affoler. Ouh la la...
Nous approchons de la dernière bouée.
Même si je veux aider Thierry, je tiens aussi à rattraper le groupe devant. Je suis certain qu'il doit y avoir des C2 dedans et il faut que je les rattrape.
Nous passons donc à nouveau la bouée de manière un peu serrée.
GOOOOOOOOOOOOOOOOO !!!
Relaaaaaaaaaaaaaaaaance !!!
Ouille
Ouille
Ouille
Ouille
Ouille
Le bon point c'est que j'ai les mêmes sensations qu'au premier tour, celles de descendre le courant.
Je me demande si ce n'est pas possible qu'il y ait du courant à cet endroit.
Mais que se passe-t-il devant ???
Il y a deux bouées blanches !!
Normalement, je devrais voir uniquement la troisième !
Je n'y comprends rien.
Je visualise le plan dans la tête.
Normalement, la deuxième bouée devrait être celle la plus à droite. Je fais donc ma navigation sur la bouée blanche la plus à droite, sans comprendre pourquoi j'en vois deux maintenant.
Est-ce qu'une bouée aurait dérivé ?
La mousse du groupe devant (zut, le groupe a accentué son avance) me conforte dans cette trajectoire.
Thierry ne me lâche pas malgré ma relance.
Ca pique, ça pique, ça pique dans les bras.
Je comprends soudain pourquoi je vois deux bouées blanches devant moi !
Ce que je prenais pour une bouée à gauche, n'est pas une bouée !
C'est le Canoë qui accompagne le dernier nageur !! Je vois en effet un nageur devant qui nage à allure modérée. Je me dis que ce doit être M. Vialonga de Viry-Châtillon en catégorie C12 (80-84 ans !!). Nous sommes en train de le doubler sur la fin de son premier tour.
Franchement, ce n'était pas une idée lumineuse d'habiller les canoës avec des t-shirts de la même couleur que les bouées...
J'ai de plus en plus de mal à tenir le rythme.
C'est vraiment très très dur.
Je sais que compte-tenu de ma proximité avec Thierry il va falloir que je relancer encore à l'approche de l'arrivée. Je n'ai pas l'impression d'avoir assez de ressources sous le pied pour le faire.
Mais j'ai un nouveau signal d'alerte.
J'ai du mouvement à ma droite. Un autre nageur nous rattrape.
Zut.
Accélère, accélère, accélère Olivier !!!
Oh mon Dieu que ça fait mal.
Ce n'est pas temps les bras qui font mal que l'impression d'être au rupteur depuis bien longtemps.
Nous approchons de la troisième bouée.
Le nageur à ma droite remonte inexorablement.
Le passage de la bouée va être délicat.
J'ai toujours Thierry à ma gauche et ce nageur à ma droite.
Désolé Thierry, personne ne passe...
Je vise l'intérieur de la bouée.
Le passage de la bouée est effectivement chaotique nous nous entrechoquons à plusieurs reprises avec Thierry.
La nageur de droite est maintenant à mon niveau.
Nous sommes tous les trois sur la même ligne après la bouée.
C'est la dernière ligne droite.
Je galère à repérer les deux bouées de l'entrée du goulot d'étranglement, tout comme j'ai peiné à trouver la quatrième bouée au premier tour.
Et en même temps il faut A-BSO-LU-MENT faire une dernière relance.
A côté de moi Thierry nage n'importe comment. Il fait beaucoup de vagues et cela me gène énormément.
Qu'est-ce que ça m'énerve.
Je suis au delà du rupteur, plus loin que la zone rouge de l'accélérateur.
Le nageur à droite prend de l'avance, prend de l'avance et prend encore de l'avance.
Non, non, non...
Les vagues à gauche s'accentuent encore.
Je réalise que ce n'est pas Thierry qui fait ces vagues mais un bateau qui passe plus loin.
Je manque de boire la tasse à plusieurs reprises. J'ai l'impression d'être secoué dans tous les sens. Nous nous tapons de manière répétée avec Thierry tellement nous nageons proche l'un de l'autre.
Il y a encore un autre nageur qui arrive par la droite.
Oh non, pas un de plus...
Je suis à fond de chez à fond.
J'ai l'impression que le panneau d'arrivée... ne veut pas arriver.
J'ai des voiles blancs qui me passent devant les yeux par moment.
Oh punaise... c'est pas bon ça.
Il y a toujours plein de vagues.
Je ne sais pas si c'est encore le bateau où le fait que nous soyons quatre nageurs à nager à bloc dans un mouchoir de poche. Peut-être les deux.
Je commence à perdre le fil de ce qui m'arrive.
Les voiles blancs se répètent. Je vais vraiment taper très très loin dans mes ressources.
Je n'arrive même plus à appréhender comment je me positionne par rapport aux trois nageurs autour de moi.
Tout n'est plus que voiles blancs, vagues, douleur et plaque d'arrivée.
J'arrive enfin : je tends la main et frappe le panneau d'arrivée.
Enfin je peux m'arrêter.
Je me laisse glisser sur le dos, complètement épuisé et au bout de moi-même.
Je ne sais même si Thierry m'est passé devant ou pas finalement.
Thierry...
Je veux lui donner l'accolade.
Mais où est-il ?
Je cherche. Et ne le vois pas.
Ah il est là avec sa combinaison.
Il me fais signe.
OH MON DIEU !!!!!!!
CE N'EST PAS THIERRY !!!!!!!!!!!!!
J'ai nagé toute la course en donnant ma vague à quelqu'un qui n'est pas Thierry... Juste quelqu'un qui lui ressemble et a le même style de nage.
Il me sert la main comme on fait aux gars avec qui on se tire la bourre pendant une course.
Je n'en reviens pas de ma bêtise.
Mais quelle andouille...
On en rigolera après lui : "j'ai trouvé que tu la jouais vachement en équipe effectivement !"
Je reconnais par contre maintenant le premier gars qui m'a rattrapé par la droite sur la fin : c'est Laurent de Nanterre ! Oh l'animal ! :)
Le quatrième homme est un nageur de Laon que je ne connais pas.
Fabiennne et Violaine sont à la sortie de l'eau.
Fabienne me dit que je suis 9ème toutes catégories confondues.
C'est pas mal.
A part David, je ne connais pas bien les autres C2 qui sont engagés dans ma catégorie. Je ne sais donc pas comment je suis classé.
Il s'avérera que je suis quatrième et que le troisième C2 est le nageur de Laon qui a pris la vague Laurent et est passé devant moi dans les derniers mètres. Même pas une seconde d'écart entre nous deux sur trois kilomètres
Scrogneugneu...
Bon, pas vraiment de regret à avoir. Je ne pouvais vraiiiiiiiment pas accélérer plus sur la fin.
Je retrouve les autres versaillais au fur et à mesure à la collation de fin de course.
Thierry sera comme moi et finira quatrième en C5.
La très belle surprise viendra de George qui termine troisième en C7. Absolument excellent pour ses premiers championnats de France en Maîtres !
Surtout qu'il a nagé toute l'année dans le groupe Adultes et nous a expliqué que c'était la première fois qu'il nageait trois kilomètres d'affilée de l'année...!
Ca promet pour l'an prochain quand il s'entrainera avec notre groupe !
George, 3ème catégorie C7. Bravo !
La belle équipe versaillaise. De gauche à droite : Fabienne, Thierry, George, moi (qui pleure de douleur intérieurement de devoir lever le bras pour donner l'accolade à George), Henri, Philippe, Olivier B & Violaine
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